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Autopsie d'un accident
15 décembre 2008

Assurance et avocat

Le boulot est vraiment quelque chose qui manque terriblement à Pierre. Il feuillette les magazines, navigue sur internet pour chercher des informations, suit l’actualité nautique. Nouveaux produits, évolution des pratiques, cours de météo, cartographie, il se régale de récits de voyages, de témoignages de pratiquants, et d’essais de matériel.

Entre deux, il continue de bichonner son matériel de voile et de moto. Il compulse les petites annonces à la recherche de la perle rare, d’une nouvelle moto.

Ses moyens financiers ne lui permettent surement pas de s’offrir une nouvelle monture.

Comment les assurances fonctionnent-elles ? Il ne comprend pas.

Son avocat se démène pourtant pour faire avancer les choses, mais il ne parvient pas à obtenir gain de cause. Tout est bloqué par des retards administratifs. Le procès-verbal d’accident n’a toujours pas été émis par le parquet d’Aix-en-Provence.

Il sait que ces choses prennent du temps. Forcément, quand on lit les journaux, tous les tribunaux semblent saturés.

Mais pourtant, la situation est claire, très claire même. Jérôme est venu le chercher un jour, lui rendre visite et passer quelques jours chez lui afin de se présenter à un concours administratif sur Marseille. Ils se sont rendus à la casse pour voir sa moto, ou plutôt l’épave de celle-ci. Et ils sont retournés sur les lieux.

Pour Pierre, pour tous ses proches, il n’y a aucun doute, il n’a rien à se reprocher dans l’accident. Il lui était impossible de prévoir qu’une auto arriverait à cet endroit, puisqu’elle n’avait aucune raison de se trouver là.

Mais pourquoi l’assurance tarde t’elle tant à établir les torts ? Ont-ils quelque chose à lui reprocher ? Si tel est le cas, il ne voit pas quoi.

Et pourtant, il a essayé de régler tous les problèmes, d’arrondir les angles avec les personnes qu’il a eues au téléphone et qui sont censées gérer son dossier.

Ces appels, il ne les oubliera jamais non plus, ils lui laisseront un souvenir amer.

Le premier appel, il s’en souvient sans aucun problème. Bien qu’abruti par la morphine, il avait téléphoné depuis son lit d’hôpital pour demander la marche à suivre pour la déclaration de son accident, et quelles seraient les démarches qu’il lui faudrait remplir lors de sa sortie.

A ce moment-là, il avait eu l’impression que son dossier était pris en charge par des gens compétents. Depuis treize ans qu’il était assuré auprès de la même compagnie, sans aucun sinistre, que ce soit pour ses véhicules ou domiciles, il n’avait jamais eu le moindre souci pour quoi que ce soit. Ses demandes de mise-à-jour, les devis qu’il avait demandés, tous ses dossiers avaient été traités avec une grande efficacité. Il avait même recommandé son agence à plusieurs reprises pour leur professionnalisme.

Après sa sortie de l’hôpital, il avait donc téléphoné pour savoir comment il pourrait espérer être dédommagé pour l’épave de son véhicule, et s’il avait le droit à une aide à domicile à la suite de son accident.

La conseillère avait été proprement odieuse, lui déclarant sans ambages qu’il n’avait le droit à aucune aide, que ces aides étaient réservées aux personnes atteintes de traumatismes sévères, ayant fini en fauteuil roulant et perdu leur mobilité.

Pierre est abasourdi. Il est obligé de se déplacer avec une attelle et une paire de cannes anglaises. Il ne peut pas conduire, ni se déplacer sans ces accessoires.

La conseillère finit par lui faire comprendre qu’elle n’a pas de temps à perdre avec des clients mécontents et par raccrocher.

Il avait alors écrit à la direction régionale de sa compagnie d’assurance. Quelques jours plus tard, la réponse était arrivée, l’invitant à prendre contact avec le responsable de l’agence, qui avait été mis au courant du dossier.

Il avait donc téléphoné.

« M Petrowski ? Pierre David à l’appareil. Votre direction régionale m’a dit de me mettre en rapport avec vous au sujet de l’accident dont j’ai été victime en novembre dernier.

-Ah, M David. Bien sûr. J’attendais votre appel, j’ai votre dossier sous les yeux, ne quittez pas quelques instants. »

Pierre est soulagé, son dossier est entre les mains d’un responsable, les choses vont enfin avancer.

« M David, vous êtes toujours en ligne ?

-Oui, bien sûr.

-Merci d’avoir patienté. Je lis ici que vous n’avez pas fait de constat lors de l’accident. Le problème est que vous n’êtes pas garanti selon notre formule « tous risques ». Comme vous avez été blessé lors de l’accident, il va y avoir une enquête de police et un procès-verbal d’accident. Nous ne pouvons dégager de fonds tant que cette pièce ne nous est pas parvenue. Elle nous est nécessaire pour établir avec certitude les circonstances, et donc les responsabilités de chaque conducteur dans l’accident. »

Pierre ne comprend pas.

« Vous voulez dire que tant que vous n’avez pas ce papier, je ne peux rien faire ?

-Non, hélas, je ne peux rien pour vous. Vous savez si vous allez vous porter partie civile contre l’autre conducteur ?

-Oui, bien sûr.

-Ah, dans ce cas, il vous faudra attendre plus longtemps encore. Vous savez, les tribunaux sont un peu surchargés et du coup les dossiers sont très longs à traiter. Vous êtes sûr de vouloir porter plainte ?

-Mais enfin, cet homme aurait pu me tuer, et je ne sais pas si je retrouverai l’usage de ma jambe. Vous ne voudriez pas que je ne réagisse pas quand même ?

-Non, ce n’est pas cela, mais vous savez, les dossiers d’accident sont très longs à traiter. Pour vous donner un ordre d’idée, le dossier le plus rapide qua j’ai eu à traiter cette année m’a pris quinze jours, et dans ce dossier il n’y avait aucun problème puisque notre assuré était décédé. »

Pierre est assommé par la déclaration du directeur de l’agence. Il n’en revient pas.

« M David, vous êtes toujours là ?

-Oui M Petrowski, je suis toujours là, mais je vous préviens tout de suite, je vais arrêter là notre conversation. Je suis assuré chez vous depuis treize ans sans le moindre sinistre, j’ai été victime d’un accident dont les circonstances ne laissant aucun doute quant aux responsabilités, et j’estime avoir le droit à un minimum de crédit auprès de vos services. Mais au vu de votre discours, je crois que désormais je vous demanderai de ne plus me contacter que par l’intermédiaire de mon avocat, qui prendra contact avec vous dans la journée. Au revoir M Petrowski, je ne vous salue pas et je ne vous garantis pas que je conserverai une assurance chez vous pour une quatorzième année. »

Il avait alors raccroché et rappelé immédiatement l’avocat que lui avait indiqué son patron, Maître Ollivet pour lui demander de se mettre en rapport avec son assurance et le mandater pour intervenir en son nom.

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Autopsie d'un accident
  • Les conséquences d'un accident peuvent être très lourde pour la victime, sur le plan physique ou sur le plan moral. Il faut parfois un déclic pour vouloir s'en sortir ou simplement tenir le coup. Ce blog est mon "déclic" à moi, et je l'alimenterai progress
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