Auto-école

Maureen était une jeune femme d’une trentaine d’année, mignonne comme tout, grande, élancée, un vrai mannequin. Elle était devenue monitrice d’auto-école par vocation, elle adorait son métier.

Lorsqu’il s’était inscrit, Pierre allait avoir vingt ans. Il n’avait pas voulu passer son permis de conduire à dix-huit ans pour la simple raison qu’il n’en avait pas l’utilité.

L’auto-école Paul Bert, dans la rue du même nom, était situé près de son lycée, ce qui lui permettait de prendre ses cours de conduite selon les disponibilités de Muriel. Un autre de ses camarades de classe, du même âge que lui, était inscrit dans la même auto-école. Ils étaient les deux « papys » de l’auto-école comme Maureen se plaisait à les appeler.

Calmes et posés, ils constituaient son bol d’air au milieu de tous les jeunes furieux qui venaient passer leur permis de conduire ou préparer la conduite accompagnée, pressés d’obtenir leur permis de conduire pour aller jouer les kakous auprès des demoiselles.

Pierre et son camarade, eux, ils voulaient tout simplement passer leur permis pour se déplacer, sortir de la ville pour rentrer chez eux le week-end. Rien de plus.

Maureen, encore aujourd’hui, c’est la figure emblématique de la sécurité routière avant tout aux yeux de Pierre.

Les premières leçons, il s’en souvient comme si c’était hier. Elle avait un principe auquel elle ne dérogeait jamais : le respect des autres. C’est comme ça que Pierre avait appris à conduire : en respectant les autres usagers. Pas en les considérant comme des dangers, mais en admettant que le fait de prendre le volant, c’était accepter de prendre la responsabilité de la sécurité des autres autour de lui.

« L’enfer, c’est les autres », a dit un jour Jean-Paul Sartre. Peut-être… Mais cette phrase a aussi un second sens selon Pierre. Si l’enfer ce sont les autres, alors il est l’enfer pour les autres également.

C’est grâce à ces préceptes que lui a enseigné Maureen qu’il a conduit pendant treize ans sans accident. Mais la prudence ne permet pas toujours de prévenir l’accident. Et il commence à comprendre les propos de Sartre. Il a croisé l’un de ses démons, et il est en train d’en payer le prix.